Au Sommet Climate Chance à Cotonou, la question de la mobilité urbaine s’est imposée comme un enjeu central de l’adaptation au changement climatique. Dans les couloirs du centre de conférence, Nelson Delamare, responsable des relations internationales au sein d’ICLEI Afrique, rappelle combien les villes sont en première ligne.
ICLEI Afrique, branche régionale d’un réseau mondial de villes et de collectivités engagées pour le développement durable, accompagne les municipalités sur des sujets clés : énergie, résilience, climat, économie circulaire, sécurité alimentaire, mobilité et solutions fondées sur la nature. L’organisation soutient les collectivités dans la planification, l’accès aux financements, le plaidoyer international et le renforcement de capacités.
« La mobilité est un aspect extrêmement important de la question de l’urbanisation et du développement urbain », souligne Nelson Delamare. Avec une urbanisation exponentielle sur le continent, les projections annoncent près de 900 millions de nouveaux citadins en Afrique à l’horizon 2050. Une pression énorme sur les infrastructures, les services et la circulation des personnes comme des biens.
La mobilité n’est pas qu’une affaire de transport : elle touche aussi à la sécurité alimentaire, à l’économie et à la santé. Les villes dépendent de l’approvisionnement en nourriture ; les embouteillages entraînent des pertes de temps et de productivité ; les crises de carburant, rappellent la vulnérabilité des systèmes de transport. À cela s’ajoutent les enjeux de pollution de l’air et de qualité de vie dans des métropoles déjà sous tension.
À Cotonou, la session consacrée à la mobilité a mis l’accent sur deux dimensions complémentaires : réduire les émissions de gaz à effet de serre liées aux déplacements, et adapter les systèmes de transport aux impacts du changement climatique. L’idée est double : limiter l’empreinte carbone tout en rendant les réseaux plus résilients face aux fortes pluies, aux inondations ou aux épisodes extrêmes.
Plusieurs intervenants venus de Côte d’Ivoire et du Port autonome de Cotonou ont partagé des exemples concrets. La digitalisation a été particulièrement mise en avant : généralisation des démarches en ligne, développement du télétravail, outils numériques permettant d’éviter certains déplacements inutiles. À l’échelle d’une ville, ces changements de pratiques peuvent réduire la congestion, les émissions et la vulnérabilité des populations les plus exposées.
La planification urbaine apparaît également comme un levier majeur. Il s’agit d’intégrer la mobilité et l’adaptation dans les schémas directeurs de transport :
- Concevoir des routes et des infrastructures capables de résister aux fortes inondations ;
- Développer des plateformes multimodales facilitant le passage du bus au vélo ou à la marche ;
- Rapprocher les services et les emplois des lieux d’habitation pour limiter les longs déplacements quotidiens.
L’objectif est clair : favoriser la mobilité douce (marche, vélo, transports collectifs adaptés) en réduisant la dépendance à la voiture individuelle et aux carburants fossiles, tout en protégeant les populations des effets du climat. « On estime qu’il y aura 900 millions de nouveaux habitants dans les villes africaines en 2050 », rappelle Nelson Delamare, insistant sur l’urgence d’anticiper dès maintenant la forme et l’organisation de ces villes.
Le rôle d’ICLEI Afrique ne se limite pas à l’expertise technique. L’organisation sert aussi de relais de plaidoyer : elle représente les villes africaines dans les grandes négociations internationales sur le climat, en tant que chef de file de la circonscription des autorités locales et municipales auprès de la CCNUCC. Elle organise également des échanges entre pairs, pour que les villes s’inspirent mutuellement de leurs projets et innovations.
Le prochain Sommet Climate Chance, prévu à Abidjan, sera entièrement consacré à la mobilité. Cotonou en aura été une étape charnière : les échanges de cette édition auront permis de poser les bases, de partager des expériences et de rappeler une évidence trop souvent oubliée dans les négociations climatiques : c’est dans les rues, les quartiers et les transports du quotidien que se joue, très concrètement, une bonne partie de la bataille climatique en Afrique.